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Comment le digital revisite les mythes

Photo du rédacteur: Gregory PouyGregory Pouy

Aujourd’hui, je reçois Julien Fernandez sur mon blog. Julien est Directeur associé et Planneur Strat pour l’agence Pavillon Rouge et j’ai trouvé son article intéressant, donc je vous laisse le découvrir et vous construire votre avis. Bonne lecture.

Capables de frapper l’imagination de l’homme, les héros et héroïnes mythiques ont inspiré les légendes, les folklores, les superstitions, la poésie, les tragédies classiques et d’innombrables oeuvres d’art. Ils sont devenus des symboles qui se transmettent de génération en génération, et demeurent ainsi à jamais ancrés dans la mémoire de l’humanité. Profondément enracinés dans l’imaginaire collectif, les mythes sont doués d’une grande vitalité: ils naissent, renaissent, vivent, évoluent avec les époques, les pays, et survivent sous des noms ou aspects multiples. Mais qu’en est-il avec la récente digitalisation de notre culture ? Est-ce que nos mythes fondateurs sont voués à disparaître, se réinterpréter ou à être absorbés par les marques ?

Le digital au service du mythe

Un courant de pensée commence (enfin) à s’opposer aux discours bien établis montrant l’impact néfaste du monde digital sur les jeunes générations. Celui-ci, porté par Thomas Jamet, défend même la thèse opposée : le phénomène numérique constitue une sorte de retour à l’essence de la nature humaine, « à sa dimension animale vivant en tribus ». L’instantanéité, les liens humains et les émotions permis par le digital et les médias sociaux devenus planétaires redonnent force et vigueur au vivre ensemble. Etant donné que l’humain est dorénavant le moteur des nouvelles technologies, que ces nouvelles technologies ont plutôt tendance à rapprocher qu’à éloigner, on constate une ouverture sociale plus large, qui n’était guère possible avant l’arrivée du digital dans nos vies. Notre imaginaire collectif est donc en mutation, tout en gardant comme point d’ancrage nos mythes fondateurs. Ces mythes se réinterprètent en se fondant sur nos contes et légendes actuels : Facebook, Google, Foursquare, ou sur des personnalités animant la sphère digitale mondiale comme Lady Gaga ou Miley Cirus. Le digital est donc une force en soi, et ne fait pas que stocker de vieilles histoires comme le ferait une bibliothèque. La résurgence du mythe par le digital, ce n’est pas le retour de vieilles histoires tombées en désuétudes, mais, au contraire, le digital vivifie et rend les mythes aptes à de nouveaux usages. Barack et Michelle Obama ou Michael Jackson ne sont pas, rigoureusement, une reprise de tel ou tel personnage mythique : ils s’inscrivent dans un récit qui relève d’un ou plusieurs mythes. Ces récits font vibrer une corde sensible au plus profond de notre psychisme. Ils réveillent notre besoin de dépassement et satisfont ce petit grain de folie qui persistera toujours au fond de l’âme humaine.

Le mythe et les marques

Les marques cherchent également à se réapproprier certains mythes fondateurs, à les réadapter afin d’inscrire leur histoire de marque au sein d’un destin qui les dépassent, transcendant ainsi leurs consommateurs, salariés… Nombre d’entreprises de l’univers du digital, à commencer par Google, Amazon, se sont fondées sur le mythe contemporain de « l’innovateur commençant dans son garage ». Rien d’étonnant à cela quand on se penche sur l’utilité du mythe pour une marque : c’est une explication toute prête sur l’organisation et la vison d’une entreprise. Il sert à mettre en valeur certains faits rassembleurs et à dissimuler les autres. Son efficacité repose sur plusieurs caractéristiques : -un mélange de faits réels et d’éléments peu réalistes -il n’a pas d’origine exacte, ni de témoin précis, ce qui facilite sa diffusion.

Autre exemple, Facebook s’est construit sur le mythe du vrai génie très antipathique. La marque n’a jamais essayée de se défaire de cette image car c’est la composante même de son histoire, qui a fédéré à ses débuts une communauté geek avant de très vite s’élargir.


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Le mythe sert donc à véhiculer la vision d’une marque et à s’entourer d’une communauté, délimitant ainsi les frontières et les modalités d’intégration ou d’exclusion des « fans ». De plus, le mythe dote les entreprises du monde digital d’une histoire de marque forte, élément nécessaire pour gagner la préférence d’un public.

Internet est donc le lieu idéal pour les mythes : un public large prêt à collaborer et une promesse de marque immédiatement identifiable ou réfutable. Les pure players du Web n’ont mis que 3, 5 ou 10 ans pour  s’imposer dans un univers marketing encombré. Même lorsqu’on n’est pas un pure player, un mythe qui s’inscrit parfaitement avec la promesse de la marque est très efficace. Moleskine, qui est une pure invention marketing, a ressuscité le carnet « en moleskine » dont se servaient des artistes légendaires tels que Van Gogh, Picasso, ou Hemingway. Une fois le nom de ce coton verni déposé, une forte accélération de la communication sur ce passé prestigieux et quelque peu « usurpé » a permis de donner une visibilité sans précédent à la marque…. Le mythe était né. La cohérence de l’expérience de marque sur tous les points de contacts, notamment internet, y est également pour beaucoup.

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George Lewi, spécialiste des mythes contemporains, propose une interprétation encore plus forte du rapport marque-mythe. Pour lui, une marque a besoin d’incarner un mythe pour devenir une méta-marque et servir ainsi de caution. Ce mythe doit ensuite être entretenu par des rites, tel que le fait Apple avec les Apple store, qui ont un rôle de temple. On rentre alors bien dans un système « d’adoration » où le mythe s’entretient. Ces méta-marques sont le contraire de certaines marques qui recherchent la moindre économie possible, quitte à oublier de travailler leur histoire… peu de chance que ces marques soient encore leaders de leur marché dans quelques années. Se pose alors la question suivante : toutes les marques peuvent-elles incarner un mythe alors même que peu d’entre elles sont réellement aspirationnelles ou narratives? Un lessivier peut il proposer la même force émotionnelle qu’une marque de luxe ? On ne pourra évidemment jamais demander à OMO de générer le même lien affectif qu’Apple. Néanmoins, toute marque se doit de se construire une histoire forte où le mythe est sous jacent. Construire un mythe propre à une marque demande du courage et de l’écoute. Il faut parfois nager à contre-courant pour  se différencier sur un marché ou apporter la solution que personne n’envisage.

Plus que jamais, au vue de la complexité du monde,  les consommateurs cherchent des raccourcis, qui, d’un coup de nom de marque, peut faire disparaître les problèmes… amis marketers, réfléchissez-y.

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Créé avec amour par Grégory Pouy
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