« Si vous travaillez dans le marketing ou la communication – suicidez vous! Sérieusement! » C’est ainsi que commence ce sketch…alors bien sur, l’objectif est de se moquer gentiment de notre profession mais on ne peut pas ni ignorer que l’image du marketer est quelque peu écornée ni les 3,7 millions de vues sur cette vidéo…tant et tellement que nous nous en amusons nous même en permanence en plaçant des « bullshit » par çi et des « bullshit » par là, terme définitivement entré dans le vocabulaire du marketer.
Nous sommes tous responsables de cette situation tant le marketing est très souvent, trop souvent, composé de publicités poussives, de lancements de produits autant inutiles qu’inefficaces ou loin de la promesse initiale. Cela s’accompagne évidemment d’une tentative de présence sur le web social en poussant toujours et encore pourquoi ce nouveau produit avec 5% de plus de çi ou de ça va être tellement « mieux pour vous monsieur le client ». « Mieux pour vous? » … Nous nous disons tous « centrés clients » mais la réalité est que nous sommes centrés sur nos problématiques personnelles dans un premier temps (notre carrière), puis celles de notre employeur puisque c’est de lui que dépend notre carrière puis viennent les collègues et les clients arrivent bien loin derrière.. Pas étonnant du coup que le client se méfie. Il est éduqué désormais mais c’est intéressant de voir ses réactions d’un produits à l’autre. Ne vous méprenez pas, nous faisons le même métier. Dans l’univers des accessoires sonores, j’ai 2 exemples qui me semblent indiqués pour parler de cette problématique.
Le Bullshit fonctionne
D’abord celui de Beats bien sur, cette marque qu’Apple souhaite racheter pour $3,5 milliards. Des casques au design marqué, un rouge et un « b » qui associés à la caution de Dr Dre ont fait de cette marque une icône des accessoires de musique. Il faut ici reconnaître la force d’adhésion à une marque (sur les jeunes en particulier en ce qui concerne Beats). Pourtant il suffit de regarder les recherches prédictives de Google pour savoir que ces casques (et autres accessoires) sont d’un très mauvais rapport qualité/prix.
Précisément ce qu’entres marketers nous pourrions appeler un produit « bullshit » à la marge maximisée et pourtant ça fonctionne. Les raisons sont relativement simples, notre société est codifiée et « Beats » s’est installée comme l’un de ces codes à l’image positive tandis que d’autres clients vous diront que « des casques à ce prix là, ils sont forcément bien ».
Partout il est écrit que pour gagner le coeur d’un consommateur “empowered” (je n’ai toujours pas trouvé de traduction juste), il faut gagner sa confiance mais comment faire si à l’origine vous savez que votre produit n’est pas bon ou peut être pas nécessaire ou alors que vous allez lancer dans quelques mois une version améliorée du dît produit? Voire les 3 en même temps…
« Don’t over-promise but over-deliver »
Ce que je trouve intéressant et c’est mon second exemple, c’est quand une marque essaie d’être honnête. C’est le cas d’une start-up pour laquelle je travaille et dont je tairais le nom pour ne pas être accusé de « publicité déguisée » ou éviter toutes critiques déplacées. D’ailleurs, je ne parle jamais des marques que j’accompagne pour éviter des incompréhensions et c’est avec toute ma distance que je me permets de parler d’eux car je trouve le cas intéressant.
Cette marque vient de lancer, sur un marché relativement saturé, une nouvelle enceinte bluetooth. Je vous épargne le pitch de la société mais elle a été créée par des fanatiques du son, avec une très sérieuse expérience dans ce domaine, désireux d’apporter aux personnes une nouvelle manière de découvrir les sons du quotidien qui nous entourent. Ainsi, ils se sont entourés des meilleurs professionnels au monde (Corée, UK, Allemagne, France, Hong Kong….) dans l’ensemble des domaines (acoustique, design, bluetooth, fabrication, application…) mais surtout ils ont décidé d’être honnêtes. Par exemple la personne qui a inventé les puces bluetooth dans tous ces types d’appareil est impliquée dans le projet, le designer est reconnu mondialement, l’acousticien coréen également… Plutôt que de proposer une enceinte tout en sachant que dans 1 an ils en relanceront une nouvelle avec plus de fonctionnalités, ils ont décidé d’intégrer un maximum d’éléments utiles dans le produit initial et de les débloquer au fur et à mesure. Ainsi, tel un software, le produit que le client va posséder va évoluer, proposer de nouvelles fonctionnalités sans que ce dernier n’ait besoin de débourser 1 cents.
En résumé, les raisons de ce choix sont simples: 1 Avoir un discours simple et compréhensible (c’est une petite enceinte bluetooth qui permet par ailleurs de (vraiment) discuter en mode conférence. 2. Avoir un produit qui se réinvente et vous surprends alors même que vous le possédez déjà 3. Faire le meilleur produit possible avec une marge cohérente tout en apportant un maximum à l’utilisateur dans le prix du marché (199 Euros)
En parallèle du développement produit, ils ont créé une plateforme afin de réunir la communauté verticale des artistes sonores avec lesquels ils travaillent énormément. L’idée est, entre autre, de réfléchir aux meilleures manières d’utiliser ces fonctionnalités existantes et d’apporter l’expérience la plus riche et la plus étonnante au consommateur. Totalement anti « bullshit » et honnête si toutefois vous avez besoin d’une enceinte bluetooth nomade…
Quand le marketing n’est pas « bullshit » cela est choquant…
On pourrait donc s’attendre à des réactions de consommateurs enthousiastes puisque la démarche n’est pas si classique. Un article de Wired parlant de cette enceinte a d’ailleurs titré son article en mettant en avant l’évolutivité de l’enceinte. Les réactions ne se sont pas faire attendre: “Mais pourquoi je payerais pour des fonctions que je ne connais pas et qui seront peut être superflues voire qui ne seront jamais débloquées”. Les lecteurs sont dubitatifs et pour le moins sceptiques. Etonnant quand le prix est de toute manière équivalent à la concurrence? Pas vraiment puisque de manière connexe, les discussions que j’ai eu avec des journalistes m’ont confirmé que s’ils trouvaient cela louable, ils trouvaient aussi cela plutôt contre intuitif en terme de business: pourquoi ne pas faire comme les autres en maximisant la marge et en lançant de manière régulière de nouveaux produits qui incluraient chacun une des innovations proposées?
« Justement parce qu’ils souhaitent gagner la confiance des utilisateurs mais aussi parce que l’état d’esprit de la marque est construit de cette manière. » D’ailleurs le fait qu’un des fondateurs répondent de manière courtoise à chacun des commentaires, même les plus insultants a étonné les lecteurs.
Je dois également être idéaliste en pensant que cette démarche payera nécessairement quand les consommateurs en parleront entre eux et quand la démarche sera reconnue par le marché mais je suis très intéressé par suivre cette entreprise et voir comment le marché accueille au fur et à mesure leurs produits. Je reste convaincu qu’une relation de confiance s’instaure sur le long terme mais est-ce qu’une start-up a les reins suffisamment solides face à des machines marketing bien huilées?
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